Rabbin Eliezer Shemtov
Vayakel – Pékoudei
La dépression est souvent induite quand les choses ne se passent pas comme on imagine qu’elles devraient arriver (sans parler de la souffrance vécue par les perfectionnistes et par ceux qui souffrent de TOC). Or, de telles situations sont inévitables : dans la vie, tout ne se passe pas comme prévu.
Comment s’élever au-dessus de ces difficultés et surmonter le sentiment négatif qu’elles peuvent provoquer ?
Un bon point de départ consiste à examiner la façon dont nous définissons le sens de notre mission.
On raconte l’histoire d’un certain Yankel qui cherchait désespérément à savoir ce que D.ieu attendait de lui. Il priait et demandait que lui soit révélé son but dans la vie. Puis un jour, une voix émanant du ciel lui répondit : « Tu vois cette montagne devant ta maison ? Je veux que tu la pousses tous les matins pendant une demi-heure ».
Plein d’énergie et d’espoir, Yankel se réjouit à l’idée d’accomplir la mission personnelle que D.ieu lui avait confiée : déplacer la montagne.
Chaque matin, il se réveillait avec impatience et poussait de toutes ses forces pendant une demi-heure. Après un mois d'efforts sans voir de résultat, la déception gagna Yankel. « En fait, D.ieu m'a confié cette tâche non pas parce qu'il croyait que je pouvais déplacer des montagnes », pensa-t-il, « mais pour se débarrasser de moi et m'occuper avec une mission impossible… » Complètement déprimé, il s'assit et pleura. Soudain, il entendit à nouveau cette voix.
« Pourquoi pleures-tu ? », lui demanda D.ieu.
« Parce que j'ai échoué dans la tâche que tu m’as confiée. La montagne ne bouge pas ! »
« Qui t’a dit que c’était le but ? »
« Si je n'étais pas censé déplacer la montagne, pourquoi m'as-tu demandé de la pousser tous les jours pendant une demi-heure ? »
« Regarde tes muscles ! Sont-ils les mêmes qu’il y a un mois ? Voilà mon objectif ! »
Dans les passages bibliques de cette semaine, Vayakel - Pékoudei[1], nous lisons en détail comment le peuple juif mit en œuvre toutes les instructions que D.ieu lui avait données concernant la construction du Michkan (Tabernacle) dans le désert. Or, nous avons déjà lu tous ces détails, lorsque D.ieu l’a ordonné à Moïse.
Cela suscite une question : pourquoi la Torah répète-t-elle chaque exécution dans ses moindres détails au lieu de dire simplement que « les Israélites ont fait comme D.ieu a ordonné à Moïse ? ». Cela aurait évité d’écrire de nombreux passages « en trop », qui ne semblent apporter rien de nouveau !
Le Rabbi de Loubavitch, זי"ע, explique qu’il existe en fait deux Michkan : le Michkan théorique tel qu'il a été ordonné divinement et le Michkan pratique construit par l'homme. Évidemment, le Michkan construit par l’homme ne pourra jamais être aussi parfait que celui imaginé et voulu par D.ieu. Pourquoi D.ieu nous a-t-Il donc demandé de Lui construire une résidence imparfaite et n’a pas créé Lui-même une version parfaite, telle qu’Il la souhaite ?
La réponse est simple : D.ieu préfère le Michkan « imparfait » créé par l'homme précisément à cause de ce qu'il représente : l'effort de l'homme pour accomplir la volonté de D.ieu.
Vous êtes-vous déjà demandé pourquoi la photographie la plus chère du monde vaut 6,5 millions de dollars[2] alors que les tableaux les plus chers valent des centaines de millions de dollars ? Ce devrait être l'inverse, puisqu'une photographie est une représentation bien plus parfaite et fidèle que n'importe quelle peinture ! La réponse est que même si la photographie peut retranscrire la création de D.ieu parfaitement, la peinture exprime la capacité et la créativité humaines. La photo incarne la perfection tandis que la peinture est une expression de « perfectionnement ».
Il en va de même pour tous les défis auxquels nous sommes confrontés. D.ieu n’attend pas de nous de faire les choses telles qu’Il les ferait, mais tel que nous le pouvons. Il n'exige pas de nous la perfection, mais de nous perfectionner, d’utiliser les outils limités qu'Il nous a donnés pour faire de notre mieux. Si le résultat de nos efforts satisfait D.ieu, pourquoi ne devrait-il pas nous satisfaire ?
Un autre point est à prendre en compte : la capacité de générer de bonnes idées n’équivaut pas nécessairement à la capacité de les réaliser. Ce sont deux talents très différents. L’incapacité de mettre en pratique une idée brillante n'est pas une raison pour se décourager et déprimer. Cela signifie simplement que nous réussissons dans un domaine et que nous devons trouver à présent quelqu'un qui a les compétences que nous n’avons pas pour réaliser ensemble ce qu'aucun de nous n’aurait pu faire seul. Certes, chercher une telle personne est déjà de l’ordre du concret et peut représenter une difficulté redoutable pour certains d’entre nous… Dans ce cas, il s’agit de trouver quelqu'un autour de nous qui peut nous aider à chercher ou à sauter le pas.
Voici donc les outils de cette semaine :
Pour évaluer notre réussite face aux multiples défis de la vie, nous devons d'abord avoir une idée claire de son objectif initial. Si nous ne savons pas exactement quel est le but, pourquoi supposer qu’il n’a pas été atteint ?
Nous ne sommes pas censés être tout-puissant, mais faire au mieux avec nos capacités. D’autres personnes peuvent nous y aider, il suffit de chercher !
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